Services bancaires

Visa cherche à amadouer Bruxelles

d'Lëtzebuerger Land du 29.04.2010

Visa Europe a proposé à la Commis­sion européenne de réduire ses commissions interbancaires prélevées au­près des clients utilisateurs de ses cartes de paiement. Elle cherche ainsi à amadouer Bruxelles afin d’éviter une condamnation pour abus de position dominante. L’exécutif européen avait épinglé Visa il y a déjà un an à ce propos. Le 26 avril, Joaquín Almunia, com­missaire à la Concurrence, a salué « l’en­gagement de Visa Europe à réduire les commissions multilatérales d’interchange (CMI) et à rendre ses règles plus transparentes ». Pour Bruxelles, il ne fait pas de doute que l’efficacité du système financier européen s’en trouvera améliorée, au profit des consommateurs et des détaillants.

La CMI est une commission interbancaire fixée collectivement par les banques membres de Visa Europe pour les paiements par carte qui sont prélevés sur le montant de l’achat par la banque du détenteur de la carte au détriment du compte du vendeur et qui est donc payée en dernier ressort par les consommateurs. Estimant que ces CMI étaient disproportionnées et pourraient restreindre la concurrence entre les banques pour l’acceptation des cartes de paiement, sans apporter d’avantages aux consommateurs, la Commission avait, le 3 avril 2009, envoyé une communication des griefs à la société. Cette dernière vient donc de soumettre à Bruxelles l’idée de ramener à 0,20 pour cent du prix final d’un produit ou d’un service la commission fixée de manière collective et facturée entre les banques pour chaque paiement effectué par carte de débit. Il s’agit-là des seuls paiements directs, donc pas les débits différés ou les paiements par carte de crédit. Cette commission est intégrée dans le prix facturé par les banques aux commerçants pour effectuer la transaction et englobe donc un coût qui sera à son tour répercuté par les commerçants dans les prix des produits vendus aux consommateurs. La réduction proposée de 20 points de base s’inscrit dans la ligne des engagements unilatéraux déjà pris par MasterCard en avril 2009, note la Commission. Cette réduction reflète l’application de la « méthode d’indifférence du commerçant », qui vise à établir la CMI à un niveau tel qu’il soit égal pour les commerçants que le paiement s’effectue ou non par carte de débit Visa Europe ou en espèces.

La proposition de Visa va maintenant être soumise aux acteurs du marché, afin d’adopter une décision en vertu de l’article 9 du règlement (CE) n° 1/2003. À l’issue de cette procédure, les engagements deviendront juridiquement contraignants et la Commission abandonnera l’enquête antitrust au sujet des CMI pour les transactions par cartes de débit. Les pays qui bénéficieront de la réduction de la CMI nationale sont les pays de l’Espace économique européen dans lesquels les CMI sont actuellement fixées par Visa Europe, à savoir le Luxembourg, la Grèce, la Hongrie, l’Islande, l’Irlande, l’Italie, Malte, la Suède et les Pays-Bas. Les CIM nationales dans les pays concernés par les engagements seront réduites d’environ 60 pour cent en moyenne, et les CIM transfrontalières baisseront d’environ 30 p.c.

Visa Europe s’est félicitée de l’aval de la Commission qui reste à officialiser. Son président, Peter Ayliffe, a déclaré que ces engagements sont « un pas important vers la réalisation de l’Espace unique de paiement en euro (SEPA) et l’abandon progressif en Europe des transactions inefficaces en espèces ». Ils permettront d’offrir, à ses yeux, une sécurité juridique aux entreprises et comprennent un mécanisme de révision du taux moyen à 0,2 p.c. si d’autres données devenaient disponibles sur les coûts des différents moyens de paiement, y compris les liquidités.

Cependant, précise la Commission, les engagements de Visa ne concernent pas les CMI pour les transactions par cartes de crédit et à débit différé « consommateurs », qui seront incluses dans l’enquête en cours deBruxelles. De même, les engagements proposés ne préjugent en rien du droit de la Commission d’engager ou de maintenir des procédures contre les règles du réseau de Visa Europe, telles que la règle imposant l’obligation d’accepter toutes les cartes, les CMI pour les transactions par cartes commerciales et les CMI interrégionales. Visa Europe et la Commission poursuivront les discussions relatives à une application adéquate de la méthode d’indifférence du commerçant aux transactions par carte de crédit et à débit différé.

La Commission indique qu’elle devrait lancer en 2010 une étude sur les coûts des différents modes de paiements et les modes de calcul. Ceci pourrait donc mener à une révision du niveau acceptable des CMI.

Sophie Mosca
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