En écoutant la nouvelle création de Claudine Muno and The Luna boots, je n'ai pu m’empêcher de penser à un morceau écrit et chanté par l'artiste irlandais, Eric Linder alias Polar, intitulé Bipolar Dream, où l'interprète ne cesse de répéter dans le refrain, «all those voices in my head». Des voix parfois menaçantes, parfois apaisantes, mais surtout des voix multiples. Telle est l'impression après la première écoute de Monsters, l'album composé et interprété par Claudine Muno, prolifique artiste luxembourgeoise qui n'a plus besoin de lettres de noblesse. En effet, son premier album avait déjà laissé les critiques béats, et ses talents d'écrivain ont aussi été récompensés à plusieurs reprises (dont le Prix Servais de la littérature en 2004). Mais cette fois-ci, la tâche est plus difficile. Chaque musicien le sait, le deuxième album est toujours plus difficile à créer. Le public est dans l'attente, sait déjà de quoi l'artiste est capable, et les erreurs des débutants sont moins admissibles au deuxième essai. Claudine Muno, par contre, ne semble pas s'en préoccuper, faisant dans ce deuxième opus ce qu'elle maîtrise : raconter des histoires. Parfois un peu étranges, parfois légèrement menaçantes. Mais le titre nous avait prévenu. Car Claudine Muno semble avoir quelques monstres dans sa tête qui ne lui laissent pas de répit. Ainsi a-t-elle des envies de meurtres dans le morceau au titre évocateur, Kill you ou bien reprend la chanson emblématique d'une génération de «grungers» des années 1990, Jeremy de Pearl Jam. Le premier single, Monsters, semble lui aussi exprimer quelques anxiétés: «I am not scared of all these monsters in your head (…) I'm glad you are as ugly on the outside as I am on the inside».Mais la nouveauté de ce disque réside certainement dans le fait que Claudine Muno s'exprime en trois langues. Cette fois-ci, l'anglais n'est plus la seule langue véhiculaire. L'album s'ouvre avec une chanson écrite et interprétée en luxembourgeois. Alaska, dont le texte n'est peut-être pas si convaincant, mais les arrangements de ce morceau sont très intéressants, innovateurs pour son producteur, Thierry Kinsch. Et la chanson en langue française Au secours apporte une vraie fraîcheur à l'ensemble de l'album. Fraîcheur renforcée par l'approche musicale des différentes chansons. Les influences sont nombreuses, en effet. Les touches personnelles des différents musiciens qui ont participé à la création de l'album se ressentent au fil des chansons. Il ne s'agit donc pas seulement d'une œuvre personnelle de Claudine Muno, mais vraiment d'un travail d'équipe où chacun a pu rajouter sa part de sel à la recette finale. Les influences de Claudine Muno se reconnaissent dans quelques grands noms de la création pop/folk féminine. Ainsi la voix et la force de la formule rappellent parfois une Ann Pierlé ou encore une Tori Amos, même si l'instrument de prédilection n'est pas le même. Mais parfois aussi, la voix de Claudine Muno rappelle celle d'une Beth Orton, qui utilise également les mêmes instruments pour composer des morceaux mélodieux et beaux. Tout est en douceur, mais toujours souligné par une puissance dans les textes et dans la locution. Cet album est donc une création aboutie. Maintenant il faudra démontrer la même force sur scène. Le premier rendez-vous est déjà pris : Claudine Muno and the Luna Boots présenteront ce nouvel album demain, samedi, à Kehlen. L'occasion pour chacun de voir sur place comment la jeune femme talentueuse réussira à captiver son public avec ses histoires parfois un peu étranges, mais surtout tellement rassurantes. En effet, elles montrent à chacun qu'un petit grain de folie ne peut nuire à personne, même s'il est parfois difficile pour ces personnes de trouver une place dans ce monde tellement formaté. Mais c'est bien pour cela que ces personnes lèvent la voix, s'avancent sur une scène et montrent, si ce n'est ce qu'ils sont, du moins ce dont ils rêvent.Monsters de Claudine Muno and the Luna Boots sera présenté demain, 11 février, à 20h30 au Café Shiny'z à Kehlen; réservations par téléphone au 091 889 15. Le disque sera vendu 15 euros auprès des bons disquaires ou peut être commandé par Internet: sur www.opderlay.lu ou www.thelunaboots.com
David André
Catégories: Rock, pop, electro
Édition: 02.02.2006