Le Fonds pour le logement à coût modéré devrait être exempté de certaines règles prévues dans le projet de loi sur les marchés publics à cause de la pénurie en matière d'habitations et de son mandat dans le domaine des logements sociaux. C'est en tout cas l'avis des membres de la commission parlementaire des Travaux publics. Ceux-ci ont amendé le texte de façon à exclure le Fonds du logement des dispositions sur l'appel à la concurrence des marchés pour la réalisation des logements.
Le traitement spécial d'un seul établissement public n'a pas manqué de provoquer l'exaspération du Conseil d'État, craignant pour le principe de « transparence souhaitable, voire indispensable, en matière de finances publiques et de concurrence » et d'égalité de traitement de tous les établissements publics, des adjudicataires et des soumissionnaires. Et de constater qu'une telle exemption du Fonds du logement, « jouant un rôle primordial dans l'exécution de la politique de logement poursuivie par les pouvoirs publics et ayant un impact important sur la marché dans le domaine de la construction de logements, revient en fait à affirmer l'échec du système légal en place ».
En revanche, le Fonds du logement ne veut perdre ses atouts majeurs : flexibilité et rapidité. Car il faut savoir que dès sa création en 1979, il n'a pas été soumis aux règles courantes des marchés publics. Jusqu'à présent, il ne doit s'en tenir qu'aux montants fixés par les directives européennes. Pour autant qu'il ne dépasse pas ces seuils de cinq millions d'euros, il est donc libre de ses choix, sans devoir passer par des procédures de soumissions publiques.
Le Fonds se considère être en concurrence directe avec les promoteurs privés et souhaite donc continuer à oeuvrer selon les mêmes conditions, sans être gêné par une nouvelle loi qui le forcerait à se plier aux exigences des marchés publics.
En réalité, il semble y avoir des différences entre les offres présentées selon le régime privé ou public des soumissions. Dans ce dernier cas, les enveloppes financières et les ratios des corps de métiers sont connus et publiés, les offres présentées sont fixées en conséquence. Les objectifs des procédures publiques peuvent aussi être minés par une pratique d'accords sur les prix, ce qui devrait en principe entraîner l'annulation et la mise en marche d'une nouvelle soumission - avec les retards et les lourdeurs que ces procédures peuvent entraîner.
Le Fonds du logement tient donc à ses privilèges qui, selon lui, garantissent sa compétitivité face aux promoteurs privés. Il appuie notamment la thèse qu'il veille à promouvoir les entreprises et les produits luxembourgeois, véritable argument de vente dans le domaine de la construction et une garantie pour la qualité du service après vente pour les clients.
Le Conseil d'État ne l'entend pas de cette oreille et s'oppose donc à l'amendement permettant au Fonds du logement de continuer à bénéficier de ses libertés : « L'institution d'un établissement public ne peut et ne doit pas avoir pour but ou pour conséquence pour les pouvoirs publics de se soustraire - par un artifice - à la législation et à la réglementation à laquelle ils sont soumis s'ils réalisent par leurs propres moyens le même objet.
L'Administration des bâtiments publics ne pourrait-elle pas au même titre et pour des motifs analogues demander à être exemptée ? »
Le sort du Fonds du logement devrait être fixé lors de la prochaine réunion de la commission parlementaire des Travaux publics, le 26 septembre.