Encore un observatoire, encore une étude, se dit-on de prime abord. Or, l’analyse des parcours scolaires que vient de publier l’OEJQS (pour « Observatoire national de l’enfance, de la jeunesse et de la qualité scolaire ») contient quelques éléments politiquement explosifs. Par exemple à la page 20, où l’on apprend que le redoublement n’a toujours pas disparu à l’école fondamentale. Bien que cette pratique soit contraire à la loi, écrit l’OEJQS, elle serait encore « fortement ancrée chez certains enseignants qui continuent à faire redoubler les élèves en difficultés au terme d’une seule année scolaire ». (La loi scolaire de 2009 ne permet qu’un « allongement de cycle », afin de briser la logique humiliante de répétitions d’activités déjà maîtrisées.) L’observatoire recommande « une application plus stricte des dispositions légales » ainsi qu’un contrôle « plus systématique » de la part des directions de région.
L’OEJQS identifie d’autres dysfonctionnements dans le système. Cela commence dès l’éducation précoce, une offre facultative conçue initialement pour les enfants de parents défavorisés et ne parlant pas le luxembourgeois à la maison. Or, il se trouve qu’aujourd’hui, ces enfants sont proportionnellement moins souvent inscrits au précoce que « les enfants issus de milieux plus aisés et parlant luxembourgeois à la maison. » Pour remédier à ce déséquilibre, l’observatoire propose que tous les enfants soient inscrits automatiquement, les parents pouvant dès lors toujours choisir de les désinscrire. La reproduction sociale est une mécanique implacable, particulièrement dans l’école luxembourgeoise. L’OEJQS constate une certaine « immuabilité dans le temps » quant aux profils des élèves relégués vers le préparatoire (l’ancien « modulaire ») : « Il s’agit le plus souvent de garçons, issus de milieux socio-économiques défavorables, parlant le portugais à la maison ». Le système génère d’énormes variations. Le taux des élèves qui obtiennent leur diplôme « dans le délai imparti » est ainsi de 74 pour cent dans le classique, de 35 pour cent dans le général et de douze pour cent pour le DAP.
Le rapport livre des données statistiques qui sont autant de points de départ potentiels pour des enquêtes plus poussées. Ainsi, le nombre d’enfants instruits à domicile est passé de 121 à 219 entre 2017 et 2022. Le phénomène frontalier (OEJQS parle de « tourisme scolaire ») est également intéressant à observer : 2 795 élèves n’habitant pas au Luxembourg y sont scolarisés, tandis que 2 427 jeunes résidents luxembourgeois sont scolarisés à l’étranger.