Il se peut que l’on connaisse désormais l’identité du créateur du bitcoin, connu jusqu’à présent sous son pseudonyme Satoshi Nakamoto. L’Australien Craig Steven Wright, qui a récemment fait son outing comme inventeur du bitcoin après avoir vécu dans l’anonymat pendant sept ans, a été identifié de manière formelle par des vétérans de la crypto-devise ayant correspondu avec lui à l’époque de sa genèse. Après l’avoir mis au défi de prouver ses dires, ceux-ci se sont déclarés satisfaits et l’ont confirmé comme le légendaire Satoshi Nakamoto, à l’origine du succès planétaire de la première expérience de cryptodevise.
La façon dont s’est établie de manière quasi-certaine la paternité de Craig Wright est assez tortueuse, et certains experts demeurent sceptiques. Les premiers éléments ont émergé en décembre dernier. Mais des contradictions et des imprécisions ont semé le doute et ont amené certains témoins des premières heures du bitcoin à réserver leur jugement. Un témoignage apparemment décisif a été apporté par Gavin Andresen, chef de la Fondation Bitcoin. Il a raconté avoir été invité à une rencontre privée avec Craig Wright à Londres au cours de laquelle celui-ci s’est prêté à ses demandes. La rencontre a eu lieu après qu’une firme affirmant représenter Wright a pris contact avec lui. Wright aurait ainsi signé à cette occasion des messages d’une façon qui prouve de manière univoque qu’il possède des clés privées dont on sait qu’elles ne peuvent appartenir qu’à Satoshi Nakamoto. Seul le véritable Satoshi Nakamoto pouvait procéder à cette opération, selon Andresen qui s’est aussi dit convaincu par la connaissance intime de l’univers du bitcoin dont a fait preuve Craig Wright, et en particulier par les détails qu’il a donnés sur les balbutiements de la cryptomonnaie.
Gavin Andresen est archi-connu et révéré dans l’univers bitcoin. En même temps, les experts ont eu beaucoup de mal à comprendre les raisons qui ont poussé Craig Wright à publier par ailleurs des éléments censés prouver son identité, mais rapidement démasqués comme ne prouvant rien du tout. Ce gap entre une preuve infalsifiable apportée en privé et les preuves facilement démontables publiées sur un blog reste difficilement explicable. De même, s’il est relativement facile de comprendre ce qui a poussé Satoshi Nakamoto à masquer son identité pendant tout ce temps, il reste à savoir ce qui a motivé Wright a sortir ainsi de l’anonymat aujourd’hui. Sans doute connaîtra-t-on dans quelque temps le fin mot de l’histoire, en particulier, les ressorts psychologiques qui ont pu pousser Craig Wright à agir de cette façon contradictoire. Andresen a précisé que Wright s’était montré hautement émotif durant la rencontre, comme s’il restait ambivalent quant à jeter le masque ou non.
Cela fait des années que la presse spécule sur l’identité de Satoshi Nakamoto, avec notamment une alerte concernant un Japonais établi en Californie et portant très précisément ce nom, une piste qui s’est avérée fausse. Le suspense semble désormais terminé. Craig Steven Wright, né en 1970, est un informaticien et homme d’affaires qui a travaillé pour plusieurs entreprises et enseigné à l’université. Il a été actif ces dernières années dans le domaine des cryptomonnaies, notamment à travers la société Hotwire Preemptive Intelligence, puis par le biais de la banque de bitcoins Denariuz qu’il a créée et pour laquelle il a obtenu des subventions fiscales d’un montant de 54 millions de dollars de la part des autorités australiennes. Il présente donc a priori toutes les compétences requises pour être l’inventeur du bitcoin, même si l’on peut aussi argumenter que ses connaissances ont pu lui permettre justement de monter une escroquerie élaborée pour se faire passer pour tel. D’un autre côté, le témoignage de Gavin Andresen a été corroboré par le directeur-fondateur de la Bitcoin Foundation, Jon Matonis. D’autres continuent de suspecter Wright de ne pas avoir apporté de preuve convaincante qu’il est bien Satoshi Nakamoto, en recyclant une clé utilisée publiquement par Satoshi Nakamoto.