Alors que la Commission européenne considère de plus en plus la fiscalité comme un facteur potentiel de consolidation budgétaire et de croissance économique, et multiplie dans ce contexte les initiatives, le Danemark ne fera pas de ce dossier empoisonné une priorité de sa présidence tournante de l’Union, qui a débuté le 1er janvier. En tout cas, il ne prendra aucun risque inconsidéré et, partant, se montrera plus réactif que proactif.
Copenhague s’évertuera à faire progresser, d’ici à la fin de juin 2012, les travaux techniques sur trois sujets politiquement sensibles : la révision de la directive sur la fiscalité de l’énergie et les projets d’instaurer une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (Accis) ainsi qu’une taxe sur les transactions financières (TTF) dans l’Union européenne.
Il accordera une importance particulière au premier de ce thème, qui lui tient beaucoup plus à cœur que les deux autres. Le Danemark, en effet, n’a jamais caché ses réticences à l’égard de la proposition d’Accis présentée par la Commission (il craint de perdre un tiers de ses recettes fiscales engendrées par les entreprises) et a toujours estimé qu’à défaut d’être imposée à l’échelle internationale, la TTF menacera la compétitivité de l’UE.
La majorité des États membres de l’Union partage ce point de vue sur la taxation du secteur financier, ce qui a incité, en novembre 2011, le Royaume-Uni à réclamer un vote « indicatif » rapide de l’Ecofin sur ce dossier, dans l’espoir de l’enterrer. À l’inverse, la France et l’Allemagne défendent bec et ongles le projet de taxation.
La situation ne sera pas aisée à gérer pour Copenhague. Pas plus, d’ailleurs, que celle qui prévaut dans le domaine de la fiscalité de l’épargne : la révision de la directive existante et des accords que l’Union a conclus dans ce domaine avec la Suisse, le Liechtenstein, Andorre, Saint-Marin et Monaco est bloquée par le Luxembourg, l’Autriche et l’Italie. Le grand-duché exige d’être mis sur un pied d’égalité avec Berne, qui a signé avec l’Allemagne et le Royaume-Uni des conventions bilatérales (dites « Rubik ») – dont la légalité est contestée par la Commission – préservant le secret bancaire helvétique.
Ce blocage affaiblit la position de l’Union vis-à-vis des États-Unis, alors qu’elle tente de convaincre Washing[-]ton d’assouplir les modalités d’application de son Foreign Account Tax Compliance Act (Fatca), qui entrera en vigueur en 2013.
Autres dossiers que le Danemark tentera de faire progresser, sans grande conviction semble-t-il : la révision de la directive sur les paiements d’intérêts et de redevances entre sociétés associées et la réforme du système européen de TVA. Sur ce dernier point, la présidence organisera un débat au niveau ministériel, dans l’espoir qu’il permettra de fixer des lignes directrices à l’intention de la Commission.
La Commission, justement, ne restera pas inactive, tant s’en faut.D’une part, elle continuera de mettre la pression sur les 27 afin de résoudre les problèmes de la taxation de l’énergie, de l’Accis, de la TTF et de la fiscalité de l’épargne.
D’autre part, elle mettra l’accent sur la bonne gouvernance économique et la lutte contre l’évasion fiscale (renforcement de la coordination entre les 27, consultation publique sur la non-double imposition, renforcement du code de conduite sur la fiscalité des entreprises et ouverture de discussions avec la Suisse sur ce thème, élaboration d’une communication sur les paradis fiscaux qui sera publiée à la fin de 2012).
Enfin, la Commission européenne prendra différentes initiatives, que ce soit dans le cadre de la communication sur l’avenir de la TVA qu’elle a présentée en décembre 2011 (instauration d’un mécanisme de réaction rapide destiné à renforcer la lutte contre la fraude et création d’un portail Internet afin, notamment, d’aider les opérateurs économiques à s’y retrouver dans la jungle des taux) ou dans d’autres secteurs (une communication sur la double taxation des dividendes est attendue).
Parallèlement, la direction géné[-]-rale de la fiscalité (Taxud) de la Commission sera impliquée dans la préparation des recommandations qui seront adressées en juin 2012 aux États membres dans le contexte du « semestre européen ». Il s’agit, pour elle, de contribuer à améliorer la « qualité » des systèmes fiscaux nationaux.