À ma gauche, Maryana, originaire du Cap-Vert et résidant aujourd’hui à Luxembourg. Elle dégage une assurance assez impressionnante du haut de ses 25 ans. Artiste multiculturelle et polyvalente, la jeune femme a réussi l’exploit d’attirer dans son sillage plus de 40 000 fans sur Instagram. Du rarement vu pour une artiste qui ne compte, à ce jour, que deux concerts à son actif.
À ma droite, Maehila, artiste belgo-indo-luxembourgeoise de 23 ans, au sourire désarmant et qui respire d’humilité. Mais, sur scène, elle se transforme et s’offre au public dans un mélange subtil de chant et de danse. Captivante et attachante, elle est peut-être l’artiste qu’on n’attendait plus au Luxembourg.
Rencontre avec deux femmes talentueuses qui font voler en éclats les étiquettes et les préjugés…
La surprise était totale lorsque le jury des Francos a annoncé que ce serait elles qui fouleraient la scène en juin prochain et qui décrochaient, par la même occasion, une semaine de coaching intensif avec des professionnels du milieu. Le mécanisme des Francos-Fabrik est désormais bien rodé et ceux qui en ont bénéficié par le passé (Maz, Bartleby Delicate, The X et Pleasing) en connaissent les avantages et la qualité. Maehila concède à demi-mots que c’est sa fraîcheur et la diversité de sa musique qui ont fait la différence. Maryana, elle, aime à penser que c’est sa vidéo de présentation qui a fait tiquer le jury.
L’air de rien, les deux jeunes femmes affichent plus d’un point commun. Des origines cosmopolites, évidemment mais aussi des influences assez atypiques. Maehila évoque directement des artistes tels Raye, Kali Uchis ou encore Nilusi, Maryana, reste plus vague, citant principalement les sonorités R’n’B, Hip Hop mais aussi les mélodies inspirées des îles. Surtout, toutes deux possèdent une sensualité à fleur de peau. Une sensualité, qu’elles l’assument parfaitement, tout en nuançant leurs propos. « J’ai clairement envie d’explorer ce monde mais tout en restant élégante. Je ne voudrais pas ‘être sexy’ seulement pour avoir à séduire le public », raconte Maehila. Même longueur d’ondes chez Maryana : « Je préfère aussi le terme sensuel à celui de sexy. De toute façon, ça fait partie de moi et de mon personnage. J’ai un corps et je l’utilise sur scène. »
L’attitude, la danse et la scène, on y vient. Lorsqu’on les a rencontrées, les artistes sortaient d’une semaine de coaching intensif organisée par l’équipe des Francos. Maryana sourit en se souvenant du premier jour : « Franchement, en une semaine, j’ai appris quasiment plus, musicalement parlant, que dans toute ma vie ! » Par exemple, dès le premier filage, elle a dû canaliser son énergie débordante. Ensuite, il a fallu apprendre à chanter tout en dansant et en utilisant l’espace de la scène. Du point de vue de la voix, elle a également beaucoup travaillé. « Avant, j’arrivais parfois à atteindre certaines notes, mais c’était par chance et je n’arrivais pas, ensuite, à les reproduire. Le coach m’a appris à le faire. » Elle a aussi dû faire preuve d’humilité : « Ce n’était pas toujours facile d’arriver confiante devant ces gens qui, ensuite, vous font des remarques. Il faut savoir les entendre et les comprendre. On nous avait dit que, souvent, au troisième jour, quelqu’un pleurerait… mais je ne me doutais pas que ce serait moi ! »
Même son de cloche chez Maehila : « Ce coaching m’a apporté tellement de choses ! D’abord, beaucoup de clarté sur ce que je veux faire et la manière dont je voulais faire sonner mes chansons. Choisir les moments où je donne plus d’énergie. Faire en sorte que le tout soit cohérent. » Elle a beaucoup travaillé la voix (comment chanter tout en dansant), les mouvements (comment bouger sur scène et se sentir plus à l’aise) ainsi que sa musique en tant que telle. « Entre la première répétition et ce que j’ai présenté au concert, c’est complètement différent. Et les remarques des coachs, Maehila ? « Aucun souci pour moi. J’ai trouvé ces gens extrêmement doués et je leur ai fait confiance à cent pour cent. Je suis quelqu’un d’assez adaptable. Je sais me remettre en question et écouter les avis extérieurs. Donc, pour moi, c’était assez facile. »
Après cette semaine intense, c’est sur la scène de la Kulturfabrik que les deux chanteuses ont montré ce qu’elles avaient appris lors d’un showcase privé où se croisent officiels eschois, journalistes, photographes, sponsors et amis des artistes dans une ambiance assez bon enfant.
Maryana est la première à monter sur scène. Fort de ses 42 000 followers sur Instagram, short sexy et débardeur slim, la jeune chanteuse installe d’emblée une présence scénique forte et semble avoir déjà bien acquis les codes du R’n’B et du Hip Hop. Seule sur scène (elles chantent toutes les deux sur une bande-son), elle utilise l’espace « comme une grande » et ne semble pas réellement impressionnée par un public qui tarde un peu à se réveiller. Quarante minutes de show intense pour une artiste souriante et visiblement heureuse d’être là. Musicalement parlant, c’est du très pro : beats hypnotiques, calibrés au millimètre et bien dans l’air du temps associés à une voix bien calée et assurée. On n’a pas vu le temps passé et, si elle ne l’avait pas timidement avoué, jamais nous ne nous serions douté que c’était là son tout premier concert.
Avec Maehila, on entre dans un autre monde. Un monde beaucoup plus introspectif et qui demande une attention de tous les instants. Pour elle aussi, les codes de la présence scénique, et le langage du corps, ont été incroyablement bien assimilés. Maehila chante mais c’est son corps qui parle. Rarement on aura vu une artiste si jeune autant ressentir sa musique. Une musique difficile à classer : On essaye de lui mettre une étiquette pop, elle s’enfuit dans le R’n’B. Lorsqu’on croit l’avoir attrapée au tournant d’un morceau électro, elle revient avec une balade qui nous enivre. Finalement, on s’est laissé faire ; son sourire nous ayant de toute façon vaincu dès l’entame du show Quarante minutes plus tard, on ressort de son concert épuisé mais heureux en se disant que le Luxembourg tient là une artiste plus que prometteuse.
Prochaine étape pour les deux chanteuses : une des scènes des Francos du 6 au 8 juin. Un rendez-vous attendu avec grande impatience mais aussi une certaine sérénité. Pour Maryana, « le plus important sera de créer une véritable connexion avec le public. J’espère aussi que cette visibilité me permettra de rencontrer des professionnels qui pourraient m’aider et travailler avec moi sur la suite de ma carrière. » Maehila, abonde dans le même sens : « Moi, j’ai envie de m’amuser ! Être plus reconnue pour le travail que je fais, aussi et, si ça peut aboutir sur d’autres dates de concerts, c’est parfait ! En fait, je n’attends rien, mais je prendrai ce qu’il y aura à prendre. »
D’ici là, elles ne chômeront pas. Maehila compte bien sortir son nouvel EP en septembre et continuer à travailler sur des nouvelles chansons qui compteront, de son propre aveu, pas mal de sonorités indiennes, Maryana, elle, a prévu de sortir un son tous les mois, histoire « qu’on ne l’oublie pas » et de continuer également à travailler sur ses morceaux.