Le titre Y Olé ! du dernier spectacle de José Montalvo fait référence à l’admiration, l’approbation dans une corrida face à une belle passe. De même, en danse, ce cri évoque un encouragement du public qui souhaite que le danseur se dépasse. Y Olé ! s’inscrit dans la lignée chorégraphique du célèbre duo Montalvo-Hervieu, composé pendant de nombreuses années par José Montalvo et Dominique Hervieu, respectivement directeurs de centres chorégraphiques et direction de théâtres majeurs en France (Centre chorégraphique national de Créteil et du Val de Marne ; Théâtre national de Chaillot et Maison de la danse et la Biennale de Lyon). Leur Orfeo (2010) a d’ailleurs été joué à Luxembourg.
Cette fois-ci, il s’agit d’une création personnelle de José Montalvo essentiellement en hommage à ses parents d’origine espagnole et d’un défi, celui d’affronter la musique de Stravinsky. Affronter Le sacre du Printemps, œuvre de répertoire tel que le disait Leonard Bernstein à ses élèves, c’est « bestial » avec des passages très aériens. Le Printemps est évoqué dans la scénographie de la partie 1 par un arrière-fond de scène, un écran lequel reprend la surface du sol avec un focus sur le visuel des racines d’arbres vues à l’envers dans leur croissance et développement et jusqu’à la floraison. Il s’agit d’un arbre qui lentement fleurit à l’envers. La vidéo est utilisée encore une fois et depuis 1980 par le créateur pionnier dans l’art de créer par la vidéo des décors merveilleux comme une fascination pour le cinéma.
En partie 2, c’est la mer méditerranée en fond de scène et une barque… véritable métaphore actuelle du passage et de la notion de rive : mort ou rêves et espoirs des migrants. Véritable réincarnation des fêtes familiales, les couleurs des danseuses et danseurs sont flamboyantes : jaune vif, orange, rouge, bleu, rose soutenu etc... Les danseurs se lancent dans un défi d’une vraie fiesta du Sud, idéalisée et fantasmée. Certains clichés sont repris mais c’est une célébration à la vie et au plaisir de la danse. Le Sacre du Printemps de Montalvo n’est pas morbide, mais bel et bien une ovation au métissage des musiques et style de danse.
La première partie nous brasse en ce qu’elle expose et fait exploser tous les styles de danse. Multiplicité et diversité des styles de danse, c’est un peu la signature de Montalvo et cela fonctionne, même si parfois le fil conducteur est difficile à retrouver dans toutes ces superpositions et ébullitions gestuelles. Seize danseurs dont quatre danseurs de flamenco deviennent des virtuoses de leur danse (contemporaine, urbaine debout ou au sol, flamenco, africaine) pour un moment. Le rythme soutenu du monument musical de Stravinsky ne laisse aucun répit aux danseurs et tout particulièrement à ceux du flamenco. Pulsations, vibrations, palpitations de la musique, c’est aussi un défi pour eux de tenir la cadence.
Alors que la partie 1 est consacrée musicalement à Stravinsky, la fête du printemps se poursuit ensuite par une partie plus intime et personnelle débutant par un concerto de castagnettes dans laquelle sont reprises des chansons populaires. La culture populaire bat son plein et à leur tour les chansons d’enfance des danseurs sont reprises,….idem…. un mélange des genres et une esthétique sonore métissée toujours le même leitmotiv. Les danseuses de flamenco jusqu’au bord de la transe sont hallucinantes et au plus près des pulsations de la musique, ceux et celles de la danse urbaine tant debout qu’au sol sont de véritables balles à rebonds avec une détente et une rapidité incroyables et dans des postures a priori intenables.
Visiblement indifférentes jusqu’à un certain point aux prouesses des danseurs hip-hop, les danseuses mènent la danse ! Il s’agit de la célébration de la vie hédoniste et non de celle traversée dans la souffrance et de la femme émancipée, libre et autonome. La femme ici crie « encore ! encore ! » et c’est une vision de la vie qui ne se célèbre pas par le sacrifice mais par le plaisir et le désir de vie.