Quelques trendscouts, des découvreurs de talents les ont déjà contactés, leur ont proposé de les programmer lors du prochain festival [Vitrin]Sonore ou au D:qliq. «Mais nous leur avons expliqué que justement, nous voulions rester anonymes, et le système des pseudonymes s'y prête à merveille,» raconte un des membres de la formation The Filthy Needles, qui, forcément, veut rester anonyme. Ils sont ze nouveau hype de cet été au Luxembourg, n'existant que sur et pour Myspace.com. En l'espace de quelques semaines, depuis qu'ils y ont leur site, leur page a été vue 925 fois, la chanson White Nights Out écoutée 485 fois, ils ont 207 amis (au mercredi soir). «Get it on with the Filty Needles» est leur slogan, leur chanson est très glamoureuse: «Let's go out tonight / to the discotake», une basse, quelques claps de mains, des déchaînements de guitares, des voix et des chœurs... tout y est pour en faire un hit. Le merchandising très soigné, plein d'humour, en plus. Forcément: les trois membres sont aussi musiciens ailleurs, chez Tvesla, Metro, John McAsskill... «C'est juste un truc comme ça, nous étions un soir à glander et on s'est dit: faisons de la musique, raconte l'un d'eux. Et puis, sur Myspace, c'est tellement simple de publier sa musique. » Myspace.com. lancé en 2003 seulement par Tom Anderson et Chris DeWolfe, deux post-adolescents américains, est devenu un phénomène mondial extraordinaire. Pensé en premier lieu comme plate-forme de rencontres pour adolescents – il faut toutefois avoir quatorze ans pour y participer –, qui y chattent, bloggent, cherchent à rencontrer de nouveaux amis, à partager leurs états d'âme ou leurs coups de cœur, à draguer aussi, le site est devenu vraiment intéressant à partir du lancement de Myspace.Music. En quelques clics, chacun peut y ouvrir un compte et installer sa propre page sur laquelle il peut publier photos, blogs ou, donc, ses morceaux de musique. Les groupes y publient leurs derniers titres que les internautes peuvent écouter, voire même télécharger gratuitement. La légende veut que c'est sur Myspace que les Arctic Monkeys ont été découverts, leurs chansons ayant été téléchargées 400000 fois en quelques mois – ce qui leur a apporté entre autres une couverture du très sérieux NME et une notoriété au moins européenne, avec tout ce qui va avec, tournées, ventes de disques. Où MTV a soudain l'air vieux jeu. Actuellement, la «communauté» Myspace.com.te plus de 100 millions de membres et s'agrandit de quelque 240000 nouveaux «amis», la moitié de la population luxembourgeoise, par jour! Même si l'utilisation de Myspace, la création d'une hompepage et le téléchargement de contenu reste entièrement gratuit, le magnat des médias australien Ruppert Murdoch a flairé l'affaire et racheté Myspace en juillet 2005 pour 580 millions de dollars. Les termes du contrat auxquels souscrivent automatiquement les nouveaux membres de la communauté affirment un financement exclusif par la publicité et garantissent que les auteurs restent propriétaires exclusifs de leur contenu, donc aussi des droits d'auteur. Myspace se réserve uniquement le droit de le comprimer et de facturer d'éventuels frais. La gratuité, la simplicité de son utilisation, la participation à un grand réseau – en quelques secondes, on peut inviter un autre internaute à devenir son ami et fonder ainsi une nouvelle communauté, voire tester sa popularité1 –, l'anonymat et la richesse de l'offre en musiques par exemple, dont on a l'impression qu'elle n'est pas filtrée par un programmateur de salle de concerts ou d'une radio et qu'on peut y faire de vraies découvertes, expliquent certainement le succès de Myspace. Pour les artistes luxembourgeois, c'est une occasion unique d'avoir une visibilité internationale sans passer par un label, un distributeur, un agent – des métiers qui n'existent guère ici. Certes, les morceaux qui y sont publiés, deux ou trois en règle générale, ne sont pas rémunérés, mais la fonction est semblable à la cassette démo de jadis, qu'il fallait en plus envoyer par la poste. Si Myspace ne rapporte pas d'argent, au moins, il n'en coûte pas non plus. Des dizaines de groupes de pop-rock, mais aussi de jazz, qu'on y trouve affirment être domiciliés au Luxembourg. Mais «Luxembourg» est aussi le nom de deux groupes: l'un, des très jeunes d'Orlando / Florida, chante un indierock un peu pleurnichard. L'autre, en Angleterre, est nettement plus rigolo, et affiche fièrement jouer de la pop noire. Si c'est pas bien trouvé, ça...
1En comparaison: Madonna a 72000 amis, Thorunn 248, Franz Ferdinand 70000, Metro 180, Sonic Youth 73000, Cold Play 153000 ou Slayer 127000.