Éco-design

La déco se met au vert

d'Lëtzebuerger Land vom 25.02.2010

Aujourd’hui, dans le domaine du bâtiment, le green business s’intéresse surtout aux constructions neuves alors que trente pour cent de l’énergie consommée l’est par les bâtiments existants. Il est donc important de réfléchir aux moyens d’élever l’existant vers des standards écologiques plus performants. Pour inciter les propriétaires à être plus vertueux, il existe des incitations fiscales pour l’isolation, les fenêtres, le chauffage. Que ce soit pour la construction, la rénovation ou simplement le rafraîchissement de la décoration, il existe de nombreux produits performants en termes énergétique ou estampillés « bio ».

Ainsi, des peintures naturelles, sans solvants sont désormais disponibles. Les peintures classiques contiennent en effet des composés organiques volatiles (COV) extrêmement polluants. Ces COV sont toxiques pour l’environnement et l’homme. L’acrylique est un dérivé pétrochimique, le mieux est donc de choisir une peinture composée de matières premières naturelles et renouvelables. Il existe notamment des peintures à base d’huile de lin dont les solvants sont à base d’agrumes, d’autres peintures sont à la chaux, à l’argile ou à la poudre de caséine, qui ne contiennent aucun dérivé de produit pétrolier, aucun siccatif nocif issu de métaux lourds, ni de des phtalates. Toujours pour les murs, il existe du papier peint écolo et équitable comme ceux du fabricant anglais Graham [&] Brown qui sont issus de forêts gérées durablement, les encres sont à base d’eau et sans solvants, et même le film entourant les rouleaux de papier peint est biodégradables. D’autres utilisent des proportions importantes de papier recyclé, et bien sûr les colles sans solvants ont fait leur apparition.

Sur les sols, les possibilités sont nombreuses, même avec de la moquette qui traîne pourtant une mauvaise réputation. Ainsi, la firme belge Bomat propose ses tapis en fibre de bambou (Cornboo), extrêmement doux, utilisant un matériaux écologique (le bambou a besoin de moins d’eau que le coton et pousse très facilement) et qui a des caractéristiques anti-bactériennes. De même, les moquettes Ikat et Batik de Balsan répondent aux critères de Haute qualité environnementale (HQE) parce qu’elles utilisent au moins 70 pour cent de déchets de fils post-industriels.

Un parquet en bois massif brut ou un linoléum naturel est une alternative idéale aux revêtements classiques. En effet, le parquet est le revêtement de sol écolo par excellence. Issu de la transformation du bois, sa pose est également écologique à condition d’éviter l’usage de colle classique et surtout de bien choisir son bois. Il faut ainsi privilégier ceux dont le cycle de vie et de croissance, couplés avec la pratique systématique de reboisement, assurent un renouvellement rapide des ressources disponibles afin de conserver l’équilibre.

Ainsi, le bambou, déjà cité, est un bois intéressant mais nécessite des transports. On choisira donc des parquets en chêne ou en châtaigner. Parallè­lement, le robinier, aussi qualifié de « faux acacia », émerge de plus en plus sur le marché. Sa présence sur le territoire et sa vitesse de croissance postulent sa faveur, de même que sa solidité, mais il n’en demeure pas moins que le robinier fait partie des arbres de type invasifs, qui se développent aux dépens des autres espèces et étouffent l’écosystème alentour si on le laisse proliférer. Aussi son exploitation doit-elle rester sous bonne garde.

C’est aussi le mobilier et la décoration qui prennent le pli de l’écologie et se targuent d’éco-conception à savoir une réflexion globale qui part de la fabrication jusqu’à la réutilisation des matériaux, en passant par le transport ou l’emballage. Parmi les méthodologies qui sont intégrées dans le processus du projet, on peut distinguer : l’analyse du cycle de vie de l’objet et de ses composants (analyse de sa conception, production, distribution, consommation, étude des pollutions et des déchets générés), une étude plus approfondie du comportement de l’utilisateur et de ses valeurs, une attention réfléchie portée au choix des matériaux et des technologies mis en œuvre pour la matérialisation de l’objet (la démontabilité, la traçabilité, la recyclabilité, des matériaux et technologies renouvelables ou biodégradables, intégration de matériaux re­cyclés), des réflexions sur l’up-grading, la modularité, la durabilité.

C’est évidemment plus difficile de penser un meuble éco-conçu que de le concevoir de manière classique avec les moyens techniques et les pièces dont on dispose pour assembler les meubles. « Il faut trouver par le dessin des astuces qu’on a habituellement par l’industrie ou la quincaillerie. Du coup vous êtes plus vigilant au fur et à mesure des étapes de fabrication d’un produit, » explique ainsi Chris­tophe Delcourt (rencontré au récent Maison et Objet de Paris) qui a dessiné Legend pour Roche-Bobois. Cette bibliothèque en chêne évoque les branches des arbres et représente un véritable hymne à la nature. « Le dessin de cette bibliothèque a été conçu pour utiliser aucune pièce de liaison ou vis. Elle est ce qu’on appelle ‘auto-portée’ car elle s’assemble sans colle. Les colles sont des solvants, ce sont des matériaux volatils dans l’air qui peuvent être nocifs. Nous avons aussi utilisé des vernis à l’eau et le bois vient de forêts durablement gérées. »

Le pouf Cover créé par Alain Berteau pour Montis est le premier meuble qui utilise son emballage comme structure. Le carton, matériau d’emballage le plus commun (des centaines de milliers de tonnes par an) est aussi le moins conservé. Et pourtant, il est bonne pâte : léger, maniable, bon marché et solide. D’où l’idée du jeune Bruxellois : On achète une boîte en carton très résistante, un polyèdre – l’origine modeste du matériau ne le condamne pas forcément à la morosité des formes. À l’intérieur, on trouve un coussin en mousse confortable et une housse matelassée en polyester recyclé de Kvadrat. On dispose le coussin, on ferme la boîte, on habille le carton avec la housse et le tour est joué.

La star anglaise du design Ron Arad a développé la table No Waste, produite par Moroso, qui ne laisse pas de déchet dans sa production. La découpe de forme ovoïde du plateau de table sert ainsi de pieds à la table. Une seule planche d’aluminium est donc utilisée pour ce meuble.

Sou­cieux de mettre l’éco-conception à la portée des nouvelles générations, le fabriquant Gautier ajoute une dimension environnementale à un modèle de chambre d’enfant. En 2006, le fabricant lance, sous le nom de Spirale, un concept astucieux de chambre de bébé transformable, en chambre junior mais très vite, un nouveau cahier des charges est ouvert. Au programme : économie de matières premières, choix de panneaux de particules à très faible teneur en formaldéhyde, remplacement du PVC par l’ABS, emballage et transport optimisés... Le tout, sans changer l’apparence des meubles. Puisque les meubles sont identiques en apparence, les bénéfices environnementaux obtenus sont imperceptibles pour le consommateur.

Les transports, eux aussi sont optimisés afin de réduire les dépenses d’énergie. Ekobo notamment, privilégie le bateau pour le transport de ses produits contre l’avion, nettement plus polluant. Roche-Bobois a lancé une ligne fabriquée directement au cœur des lieux d’exploitation forestière pour éviter le transport de bois non utilisé.

Jade Fairbanks
© 2024 d’Lëtzebuerger Land