Dossier « Wickrange »

L’épine du pied

d'Lëtzebuerger Land du 19.02.2009

Le Conseil des ministres devrait tenter de trouver aujourd’hui une solution pour éviter la construction de 23 000 m2 de surface commerciale à proximité de l’autoroute A4 à Wickrange – en pleine zone verte interurbaine. Un projet dont le ministre de l’Aménagement du territoire Jean-Marie Halsdorf (CSV) a essayé dès le début de se débarrasser par tous les moyens, car à ses yeux, il est incompatible avec les grands principes de l’IVL (Integratives Verkehrs- und Landesentwicklungskonzept), qu’il veut imposer pour le territoire du grand-duché depuis son entrée en fonction en 2004. Pour l’heure, il s’agit de trouver un moyen élégant de se sortir du bourbier sans trop laisser de plumes de part et d’autre. Surtout après que le recours en annulation du ministre de l’Intérieur contre l’autorisation de construire ce centre commercial ait été rejeté par le tribunal administratif (d’Land, 19 décembre 2008). 

D’abord, le gouvernement ne semble pas être trop enthousiaste pour déclencher la procédure de tutelle générale qui permettrait au grand-duc d’annuler une autorisation, lors­qu’elle elle est contraire à la loi ou à l’intérêt général – pour autant que l’ensemble des ministres soient d’accord. Ensuite, l’autre option est de vérifier si ce projet lancé par l’entreprise internationale d’investissement et de développement de projets ING Real Estate Development Belgium et de l’entreprise Guy Rollinger ne ferait pas plus de sens s’il était construit dans une autre zone du pays. Et l’hypothèse de joindre ce projet-ci avec un autre, celui du nouveau stade à Livange, dans les alentours de l’hôtel Ibis, est à discuter et à analyser. 

Car ce site fait l’objet de rumeurs persistantes depuis plusieurs semaines. Le député libéral Eugène Berger a d’ailleurs posé une question parlementaire sur l’implantation du nouveau stade fin janvier au ministre des Sports Jeannot Krecké (LSAP). Une autre option serait de transférer le centre commercial à Esch-Belval ou même dans le quartier de la gare à Luxembourg-ville, mais la balance penche en ce moment nettement en faveur de Livange, dans la commune de Roeser. 

Les négociations avec les promoteurs seraient en cours, apprend-on de sources proches du dossier, mais une décision définitive et officielle n’avait pas encore été retenue lorsque nous mettions le journal sous presse. Car les enjeux financiers sont de taille. La difficulté est sans doute de trouver une solution satisfaisante pour tous les intervenants – quitte à faire racheter par l’État les terrains de Wickrange à l’entreprise Rollinger et de l’obliger à réduire son projet initial. La firme avait développé un concept de centre commercial de 31 540 m2 avec 130 magasins et quelque 2 500 places de parking. La création de 1 200 emplois avait bien sûr été un atout important pour vendre l’idée, notamment au ministre des Classes moyennes Fernand Boden (CSV), qui avait donné son feu vert sans tenir compte des avis négatifs de la commission de l’équipement commercial et de la commission d’aménagement. La première avait émis des doutes en 2007 quant au risque de déséquilibre dans les différents secteurs commerciaux.

Mais la réalisation d’un grand projet avec le stade de football à Livange pose, elle aussi, la question de la compatibilité du site en discussion avec les axiomes de l’aménagement du territoire. Car même si l’emplacement choisi se trouve à proximité de l’échangeur Bettembourg de l’autoroute A3, la prochaine gare ferroviaire de Berchem se situe à quelque deux kilomètres de là. Ce n’est pas vraiment un argument qui pourra persuader les visiteurs à utiliser les transports publics, à moins d’aménager une nouvelle gare dans les alentours, à l’instar de la liaison ferroviaire de la Nordstad entre Ettelbruck et Die­kirch dont l’utilité avait à un moment été mise en cause par les planificateurs du masterplan pour la région.

Mais tous les moyens sont bons pour éviter le mastodonte de Wickrange, même si la première déçue en sera la commune de Reckange-sur-Mess qui s’était d’ores et déjà investie corps et âme dans « son » Shopping center, quitte à se mettre à dos Monder­cange, la commune voisine. Mais le gouvernement saura certainement trouver des incitants pour apaiser les esprits.

anne heniqui
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