« Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées » Perdican, sous la plume d’Alfred de Musset en 1834, n’avait pourtant probablement pas vu Belle comme la femme d’un autre qu’il en arrivait au même constat : on ne badine pas avec l’amour. Il aurait alors pu en toucher deux mots à Clémence (Zabou Breitman), juge aux affaires familiales et chienlit en chef. Elle est sur le point de se marier avec Gabriel (Olivier Marchal), mais pour tester sa fidélité, lui envoie Olivia (Audrey Fleurot), belle rousse incendiaire. Réalisant un peu tard l’étendue de son ânerie, Clémence prend le premier avion pour la Réunion, où son futur époux doit séjourner afin de signer un important contrat. Or, pour ne pas bousculer son client, Gabriel a dû admettre qu’Olivia était son épouse. De quiproquos en vrais coups de foudre, le couple va connaître tous les affres du marivaudage. Perdican applaudirait des deux mains, le spectateur contemporain, peut-être un peu moins.
Car malgré un tournage en Réunion handicapé par un cyclone, Belle comme la femme d’un autre n’est pas vraiment un avis de grand frais sur le genre de la comédie romantique. Catherine Castel, dont c’est le second long-métrage après 48h par jour (2008), ne rougit pas devant quelques clichés à peine déguisés et des situations convenues. Le scénario suit les codes, tout est à sa place, rien ne déborde du cadre et la mise en scène est elle aussi un peu sclérosée par le manque d’audace. Pourtant, malgré toute absence de surprise, le film ne manque pas de charme, porté par des acteurs tout en légèreté, loin de leurs rôles habituels, à commencer par Olivier Marchal, dont le rôle de menteur par omission et vrai gentil bouscule les personnages de flics fatigués qu’il a l’habitude de camper. Quant au supposé antagonisme entre les deux femmes (la maman et la putain), il se retourne au fur et à mesure : la femme fatale se mue en compagne douce et compréhensive, tandis que l’épouse trahie laisse apparaître toute sa mesquinerie et ses désirs refoulés. C’est là que Catherine Castel réussit le mieux son film, tout attachée qu’elle est à dépeindre les mœurs supposés modernes des relations hommes-femmes : la frontière entre victimes et bourreaux est bel et bien abolie. Même si son illustration de la patronne de l’agence des tests de fidélité n’était absolument pas nécessaire, sa vision du couple n’est pas manichéenne, ce qui inscrit définitivement le film dans son époque sans pour autant en faire un manifeste. Co-produit par la société luxembourgeoise Iris productions (les scènes d’intérieurs ont été tournées au grand-duché), Belle comme la femme d’un autre reste un divertissement inoffensif mais honnête et qui témoigne d’une solide direction d’acteurs. Marylène Andrin