Àl’opposé des grandes messes pour actionnaires, qui tournent parfois à la foire d’empoigne, l’assemblée générale ordinaire du Foyer, qui s’est tenue mardi, ressemblait à une réunion entre amis. Tout le monde se connaît par son nom et cette familiarité
n’incite pas les actionnaires à pousser l’insolence très loin ni à hausser le ton. Les rares questions étaient convenues, pour ne pas dire complaisantes. Les réponses tout aussi conventionnelles. Un seul actionnaire, un institutionnel belge, viendra troubler, par unvote négatif sur les rémunérations des administrateurs1, la mécanique lisse et bien huilée de l’assemblée.
Conseil d’administration au complet moins un et dix-huit actionnaires présents ou représentés se glissent à l’heure prévue dans une petite salle du nouveau siège du Foyer à Leudelange. L’absence de Patrick Zurstrassen, qui fut le premier administrateur
indépendant à faire son entrée dans l’entreprise, frappe d’autant plus que cemardi est un jour un peu particulier pour la société.
Une assemblée générale extraordinaire a été convoquée dans la foulée de l’ordinaire pour approuver des changements de taille dans les statuts. La société va en effet se conformer aux recommandations émises quelques mois plus tôt par la Bourse de Luxembourg sur les principes de la gouvernance d’entreprise. Rien de bien révolutionnaire dans les recommandations. Le minimum syndical requis de la gouvernance : limitation, pour les administrateurs, du nombre de mandats possibles à cinq ; limite d’âge à 70 ans, interdiction faite à des personnes morales de siéger dans le CA (d’où la substitution de Jacquot Schwertzer à Luxempart) ; séparation entre la fonction de président du CA et celle d’administrateur délégué, etc. François Tesch, le président
du conseil d’administration et CEO du Foyer, deux fonctions désormais incompatibles avec les principes de gouvernance, mais qu’il cumule encore provisoirement cette année en attendant la nomination d’un nouveau président2, avait d’ailleurs participé aux travaux de confection du texte signé par la Bourse. Patrick Zurstrassen est une des figures de proue de la gouvernance
au Luxembourg. Il a également été associé à la rédaction des dix recommandations.
Le patron du Foyer fait le décompte des actionnaires présents ou représentés : plus de 7,4 millions de titres sur un total de 8,99 millions d’actions.
L’actionnariat populaire ne s’est pas déplacé à l’assemblée. Pas plus que les investisseurs institutionnels qui auront droit à un tête-à-tête séparé avec les dirigeants du Foyer un peu plus tard dans la soirée.
Quinze pour cent ducapital du Foyer est coté en Bourse à Luxembourg et à Bruxelles (le gros des transactions se fait sur cette place d’ailleurs et un accord avec la banque KBC a été signé l’année dernière pour animer le cours du Foyer), le reste étant détenu par Foyer Finance, une société majoritairement contrôlée par des intérêts familiaux. Avec ses 4,7 pour cent du Foyer, la société de participations cotée Luxempart contribue, selon les dirigeants, à faire unpeu remonter le taux du flottant d’une société « pas très liquide ». Mais comme le signale François Tesch à l’assemblée, les efforts de la société pour être plus visible sur le marché commencent à porter leurs fruits : « Des fonds d’investissement s’intéressent à votre valeur », dit-il. La création de valeur se situe, selon lui, « à plus long terme ».
Un terme que les investisseurs, les yeux souvent rivés sur les dividendes et les bénéfices à court terme, ne chérissent pourtant pas tant que ça.
Ceci dit, le patron du Foyer ne s’est pas attardé lors de l’assemblée sur la stratégie qu’il compte adopter pour créer cette valeur, notamment en développant le réseau de distribution des produits à l’international et en élargissant la zone géographique de sa prospection. Si le maillage du territoire luxembourgeois est assez bien assuré par le réseau de courtiers, hors du Grand-Duché, les tuyaux de commercialisation restent le talon d’Achille du groupe dont les primes d’assurance vie à l’international ont
considérablement chuté en 2006.
Les « traditionnels » contrats d’assurance vie ont montré une baisse de régime de 38 pour cent avec 70 millions encaissés. La dégringolade a été plus forte encore pour les contrats d’investissements (produits adossés à des fonds d’investissement) : - 62
pour cent avec une récolte de 81 millions d’euros.
La baisse a deux explications principales. D’abord une exposition très marquée en Belgique a été préjudiciable cette année à la compagnie suite à l’introduction dans ce pays en 2006 d’une taxe de 1,1 pour cent sur les primes. Les clients hésitent donc à souscrire des contrats labellisés Luxembourg. Selon les chiffres du Commissariat aux assurances, le marché belge, qui représente autour de 40 pour cent des souscriptions des assureurs luxembourgeois en libre prestation de services, s’est effondré de 18 pour cent l’année dernière.
Ensuite, le fait que trois importants apporteurs d’affaires ont réduit leur contribution. Il faut encore ajouter que l’assureur avait profité en 2005 de larges flux de souscriptions venus d’Allemagne. Les investisseurs s’étaient rués sur les contrats uxembourgeois avant que l’ancien régime fiscal favorable ne soit abrogé. Des primes one shot qui ne se sont pas renouvelées
l’année dernière.
Toujours est-il que la compagnie a gagné de l’argent dans la branche vie : 8,83 millions d’euros, soit une hausse de 26 pour cent par rapport à 2005. L’essentiel provient de l’activité locale : Foyer Vie a engrangé un résultat net de 6,98 millions d’euros alors que Foyer International affiche un petit bénéfice de 1,40 million d’euros. Raiffeisen Vie, le joint-venture avec la banque Raiffeisen montre un résultat tout juste équilibré avec toutefois un encaissement de primes à la hausse de 36 pour cent en 2006 à 4,43 millions, mais une forte sinistralité. Foyer Vie a enregistré 63 millions de chiffre d’affaires (-3,4 pour cent) avec une baisse assez
spectaculaire dans la vente de produits financiers (-31 pour cent) sur le marché domestique.
Les dirigeants du Foyer ont évoqué le fléchissement des primes des clients particuliers en raison notamment « d’un fléchissement des primes en provenance d’un réseau bancaire qui n’a pas pu être compensé totalement par (le) réseau d’agences ».
L’assurance groupe, Foyer a dû faire le deuil d’un de ses gros clients et son forcing commercial sur les PME n’a pas pu compenser
totalement cette perte.
Les chiffres 2006 rappellent toutefois que Foyer est d’abord une compagnie traditionnelle pour le marché luxembourgeois : le chiffre d’affaires non-vie a représenté un montant de 227,7 millions d’euros (- 1,2 pour cent) pour un résultat consolidé de la branche frisant les 67 millions d’euros (+ 64 pour cent).
La gestion d’actifs reste encore une activité accessoire avec moins de deux millions d’euros de résultat tiré de cette activité. François Tesch entend d’ailleurs renforcer ce pole de compétence et doubler les actifs sous gestion qui s’élèvent actuellement à 500 millions d’euros.
Le résultat consolidé du groupe à 77,6 millions d’euros a été fortement influencé par la plus-value de cession de l’immeuble du Kirchberg pour un montant net de 20,3 millions d’euros.
En 2007, l’entreprise table sur les revenus extraordinaires qu’elle dégagera de la cession de sa participation de 11,6 pour cent dans Audiolux, ce qui devrait lui permettre de tirer une plus-value de l’ordre de 20 millions d’euros, exonéré d’impôts. Reste encore le gros du chantier : séduire les investisseurs institutionnels.
Les résultats 2006 n’ont pas vraiment donné l’impression que Foyer était une valeur de croissance, ses dirigeants sont bien forcés de l’admettre. Le Price Earning Ratio (PER), c’est-à-dire le rapport entre le cours de bourse en bourse de l’entreprise et son bénéfice après impôts, ramené à une action (bénéfice par action), s’affichait à 8,24 fin 2006 contre 8,10 un an plus tôt. «Ce
multiple pourrait être plus élevé, car il ne reflète pas encore le multiple d’une action en forte croissance », a relevé le CEO du groupe qui promet en 2007 « de montrer une image de croissance du groupe ».
1 Les rémunérations des administrateurs pour l’exercice 2007 sont les suivantes : une indemnité de 9 000 euros par administrateur et de 11 000 euros pour le président ; jeton de présence à 1 000 euros par réunion et jeton de 1 000 euros par réunion d’un comité spécialisé.
2 À la question de savoir si le prochain président du CA du Foyer sera un administrateur indépendant, François Tesch a repondu : « Peut-être ». Le dividende du Foyer qui sera distribué s’élève à 1,14 euro net par action.